Cela faisait quelques mois que cette série languissait, la voici de retour avec de nouvelles découvertes 🙂 Et si ça vous intéresse, voici les liens des épisodes précédents :
- #1 : Wait but Why & C. Cassandra
- #2 : My Life as a Background Slytherin & Laurel
- #3 : D’encre et de Sel & Shen Comix
Une fois de plus, je mélange les styles et les nationalités, avec une illustratrice humoristique américaine (enfin je crois ? Anglo-saxonne en tout cas) et un médecin français dont les histoires sont beaucoup moins rigolotes, mais valent d’être lues.
Sarah Andersen, les petites choses de la vie
Je suis Sarah Andersen sur ses comptes Facebook et Twitter. Ses petites BDs se rapprochent du style de C. Cassandra pour le côté « relatable » (je ne sais pas trop comment traduire ce mot ? « Madame tout le monde » ?) et de Shen Comix pour le côté dépressif mêlé d’ironique. On y retrouve par exemple :
- des comparaisons « attentes vs réalité »
- des artistes en pleine crise de doute
- des gens qui n’ont pas forcément envie d’être les meilleurs
On alterne entre des petites bulles de légèreté (adoration des animaux, passion pour Halloween, etc.) et d’autres réflexions plus sérieuses, par exemple sur des phénomènes d’anxiété, les difficultés de l’âge adulte, ou le déni face aux problèmes.
J’aime bien son style complètement épuré, presque naïf (surtout qu’elle révèle parfois qu’elle est aussi capable de dessiner de très jolies choses). Elle aborde des sujets difficiles avec une simplicité qui dédramatise les choses tout en attirant l’attention dessus. Sa relation avec son copain est très mignonne, on s’attache aussi à son chien (adorable et débile) et à son chat (créature du diable). Et puis n’oublions pas le petit lapin dans sa tête ^^
Alors Voilà, les grandes choses de la vie
Je ne sais plus qui m’avait recommandé le blog d’Alors Voilà, mais depuis que je l’ai découvert je lis ses lettres hebdomadaires avec beaucoup d’attention. Ce blog est tenu par un dénommé Baptiste Beaulieu, et chaque article raconte des tranches de vie de médecins, de soignants, et aussi de patients. Le but est de « réconcilier les gens avec le milieu médical » (un but partagé par le génial Vie de Carabin). Ses chroniques sont aussi partagées sur France Inter. Ce sont des histoires qu’il a vécues lui-même, ou bien racontées par d’autres soignants.
Ses textes sont extrêmement touchants, parfois drôles, souvent bouleversants. Plein d’histoires étonnantes, uniques, tragiques, infiniment diverses et qui pourtant nous parlent toujours. J’aime beaucoup découvrir ce genre de textes très personnels. Parfois, je crois que j’ai du mal assimiler intellectuellement l’idée que les 7 milliards d’êtres humains sur terre (et les quelques 120 milliards qui nous ont précédés), tous les gens qu’on ne fait que croiser dans la vie ou dans la rue, tous ceux qu’on ne verra jamais, sont tous des individus à part entière, avec tous autant de rêves, de joies, de chagrins, de peurs. Ça fait une somme si délirantes d’émotions et de sentiments ! Mais les blogs comme Alors Voilà ont le mérite de donner une voix à tous ces gens qu’on ne connaît pas, de les laisser s’exprimer pour plus qu’un tweet ou un like, de nous faire partager un vrai morceau de leur existence.
Voici quelques extraits des dernières lettres :
« Le visage d’aujourd’hui est celui de Jeannine, 95 ans, une belle vieille dame que j’ai reçue un jour au cabinet médical. Elle était voutée, ridée, tremblante, le pas mal assuré, la vue trouble, bref, arborait tous les stigmates de la vieillesse. […] Je l’examine. Lui trouve une tension artérielle un peu élevée. Pas grand-chose. […]
Jeannine me demande :
Combien, la tension ?
Je lui explique :
« Un peu élevée, mais c’est pas grave »
– Vous êtes sûr, docteur, que ce n’est pas grave hein ?
– Oui, oui, ne vous inquiétez pas.
Et voilà qu’elle me fait répéter une fois, deux fois, trois fois, de quatre manières différentes, que non, avoir un peu de tension artérielle à 95 ans, ce n’est pas grave.
Elle me l’a fait répéter combien de fois, à votre avis ?
Sept fois. SEPT-FOIS.
Et je dois bien avouer qu’à la cinquième, moi, du haut de mes 27 ou 28 ans, c’est à dire du haut de cette facilité-là que confère un jeune âge, je commence un peu à me sentir irrité de devoir répéter et impuissant à la rassurer.
Allons, 95 ans ! Et elle s’inquiète pour un peu de tension artérielle ? Mais il faut bien savoir rendre les clefs, un jour, non ?
J’étais, et le suis encore un peu j’espère, ce qu’on appelle communément « un petit con ».
Car soudain, elle lâche d’une petite voix fluette, cette petite voix enfantine qu’adoptent certaines personnes très âgées, cette petite voix capable de dire papa ou maman pour parler de leurs géniteurs morts des années plus tôt, avec ce ton voix de l’enfance revenue donc, elle lâche :
« C’est que, docteur, moi, je ne veux pas mourir ».
Voilà. MOI, docteur, je ne veux PAS mourir.
Ce n’était plus une vieille dame qui parlait. C’était l’humanité toute entière.
Qui a peur. Qui doute. Qui ne sait pas s’il y a un après. »
« Alors voilà. Je suis pédopsychiatre et cette journée a été marquée par 2 Enfants Particuliers.
Tanguy a 9 ans. Il a été placé en urgence pour carences affectives, éducatives et maltraitances il y a quelques jours. Sa mère, enceinte, a été retrouvée alcoolisée et en errance. Ne pas juger. Dans le foyer d’accueil d’urgence, il explose à la moindre frustration. Ils ne savent plus comment faire pour l’apaiser. Lorsque je le rencontre, c’est un petit animal aux aguets. Il refuse tout en bloc mais accepte finalement l’échange, il collabore à sa manière. […]
Et ensuite Leila qui arrive cet après-midi de pédiatrie. Elle a fugué de son foyer et a fait une mauvaise rencontre. Un type qui l’a accostée, l’a effrayée. Et Leila la mal aimée, Leila qui est persuadée que rien de bien ne peut lui arriver, Leila qui se met en danger, a dit non mais n’a pas osé se débattre. Violée. Pas de préservatif. Elle a 14 ans. […]
Il est 20h, ma journée est terminée. Je me rends directement dans mon petit resto favori. C’est l’été. La terrasse est très agréable. Des touristes, des familles avec leurs enfants profitent de cette belle soirée.
Deux mondes… Impossible de basculer dans celui-là malgré ses attraits. Impossible de faire sortir les enfants de mon esprit.
Tanguy et Leila, on aurait envie qu’ils soient des Enfants Particuliers comme dans les livres, avec des pouvoirs pour se sortir des situations horribles. »
Voilà.
Personnellement je m’évanouis à la vue du sang et j’ai le défaut de m’intéresser essentiellement à ma petite personne et à mes proches, alors face à tous ces gens qui dédient des années d’études monstrueuses et tout le reste de leur vie à soigner les autres, je suis confondue d’admiration. Et je remercie les blogs comme celui-ci qui m’aident à me rendre compte que la réalité est encore bien différente de ce que je crois connaître.
Crédits image : Emma Matthews on Unsplash
Merci pour ces découvertes (quoique j’avais déjà vu des vignettes de l’illustratrice) !
J’ai juste une interrogation sur Alors, voilà. Je n’ai pas été sur le site mais j’espère que les noms sont changés. Protection des données personnelles, tout ça tout ça ^^
J’ai découvert les Questions Composent. Je pense que ça mérite plus d’attention pour voir si c’est un site qui vaut vraiment le coup mais ce que j’ai aperçu m’a l’air intéressant. Est-ce que tu connais?
Tiens non, je ne connaissais pas, je vais y aller jeter un œil 🙂
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